A ton bourreau

par Vincent Lamy (lire aussi Cauchemar des délices de la drogue et Des Airs et Le flingue de ma raison)


Les deux types s'étaient réfugiés dans une vieille baraque en raz campagne, en pleine nuit. Les volets étaient tous clos. HAL, épiait par une fissure, le visage patibulaire et grimaçant. Aux alentours, il n'y avait qu'un silence stressant.
Une pièce était éclairée par une simple lampe de chevet. L'intérieur était une décharge sale et puante. TOM regardait bêtement la télé au milieu de canette de bière vide. Il plongeait souvent sa main dans un paquet de chips. Il était plus serein que HAL. TOM l'observa un bref instant :
- Je vois pas ce qui te fout les boules ? C'est pas la première fois. ni la dernière.
- Ouais, mais là. un prêtre ! Dit HAL, nerveux.
- Je ne vois pas le blèm' !
- C'est quand même un homme d'église.
- Fallait pas le faire.
HAL était exaspéré par ce qu'il venait de sortir.
- Tu peux me dire avec quoi on va payer tes bières et tes chips ?
Il y eut un vrombissement de moteur. HAL était aux aguets. Il saisit le flingue le plus proche. Il fit signe à TOM d'éteindre la lumière et cette télé. HAL voulut identifier la bagnole. Il était aveuglé par la puissance des phares.
Toujours décontracté, TOM demanda :
- Ca ne peux pas être les flics ! Reste tranquille, mec !
- La ferme ! Grommela-t-il entre les dents.
On frappa à la porte. HAL tentait tant bien que mal de voir qui s'était. Il ne voyait qu'une ombre en contre-jour.
Une voix féminine fit faiblement :
- C'est SC !
HAL ne répondait pas. Il voulait absolument la reconnaître de visu. TOM râla :
- Mais c'est elle, voyons ! On avait rendez-vous ! Ouvre !
HAL se décida enfin à ouvrir, méfiant. SC entra dans la maison sans donner la permission.
C'était une jeune femme d'une trentaine d'année. Elle était emmitouflée dans un imperméable, masquée par un chapeau et de grande lunette noire.
Elle posa une enveloppe sur une table. HAL allait la prendre. Mais avant, SC demanda :
- Vous avez fait ce qu'il y avait à faire ?
- Du beau travail ! On attend la suite.
- La suite ?
- Oui ! Il est dans la cave. Vous voulez le voir ?
- Non, non, le voilà mort. Enterrez son cadavre et qu'on n'en parle plus
- Mort ? S'étonnèrent-ils.
- Oui ! Mort ! Vous l'avez tué ?
- Non, on l'a kidnappé. mais pas tué.
SC s'énerva :
- Je n'ai jamais demandé à le kidnapper. Il fallait le tuer. Lui mettre une balle dans la tête. c'est simple, non ?
- On n'avait pas compris ça !
- Vous êtes qui, exactement ? Demanda-t-elle, affligée.
- Des kidnappeurs ! On kidnappe et on rançonne !
- Vous ne tuez jamais ?
- Qu'en cas de force major !
- Bon, vous allez descendre dans cette cave et me l'abattre.
- Non ! HAL était catégorique ! C'est pas dans nos habitudes.
- On est pas des tueurs, nous ! Ajouta TOM.
- Mais on peut vous en recommander un !
SC était remontée contre eux. Elle avait une idée. Celle-ci lui faisait peur. Elle se lança quand même.
- Passez-moi votre arme !
- Pourquoi faire ?
- Ca me regarde ! Passez-la moi !
HAL lui donna son revolver. Il semblait si lourd dans sa main. Elle le maintenait le plus fermement possible.
- Où est la cave ?
TOM lui ouvrit la porte. Il y avait un noir opaque. On lui avait donné une lampe torche.
A part, TOM demanda à HAL :
- Elle le flinguera ?
- Si c'est ce qu'elle veut.
- Si elle le fait. On le laisse et on se casse.
- Mouais ! Ç'aurait été un séjour écourté !
SC avait le prêtre dans son faisceau. Il était bâillonné. Il s'agitait, effrayé, mais épuisé. Elle le mettait en joue. La main sur la crosse, le doigt sur la détente, elle hésitait. Le mécanisme du flingue cliqueté à cause des tremblements de SC.
Il voulait dire une chose. SC sans savoir pourquoi, lui retira le scotch d'un coup, sur la bouche. Après un long moment où celui-ci reprenait son souffle, il dit :
- Qu'avez-vous l'intention de faire de moi ?
Elle ne put se retenir de répondre :
- Vous tuer !
Le prêtre avait dresser l'oreille. Il fit, stupéfait :
- Sandrine Cahieux ?
Elle était déstabilisée. C'était bien elle.
- Ma petite Sandrine. Qu'est ce.
Elle lui tira une balle. Le prêtre gisait dans une marre de sang.
Elle ressortit de la cave, tourmentée. HAL et TOM la regardaient en silence.
Elle leur dit, d'une voix cadavérique :
- Je vous laisse l'argent.
Elle marchait vers la sortie. Elle respirait avec une sorte de convulsion violente. Au passage, elle déposa fébrilement le flingue.
Sandrine monta dans sa voiture. Elle demeura pensive derrière le volant. Sur la banquette arrière, il y avait une masse. Une petite voix dit :
- On est où maman ?
Les nerfs de Sandrine étaient un peu plus adoucis.
- Rendors-toi chéri ! J'ai fait en sorte qu'on ne te fasse plus de mal, qu'on te respecte.


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