Nepenthe

par ketamine

Quand j'ai goûté l'eau turbide de tes larmes, quand le limon a débordé de tes yeux, quand l'heure est venue d'essorer tes cheveux, ras, encastrés dans la bonde d'une baignoire naphtalinée, quand j'ai fermé la porte de cet appartement scellé, toi démembrée gisant dans la baignoire, le chat d'ivoire posé sur la table, je me suis assis et j'ai compté. J'ai compté le nombre de rats dans tes mots, la force de l'immonde, et sur tes doigts sans caféine que j'ai léchés, je n'ai pas su trouver le goût du mal, l'odeur fécale de la beauté. Et tes doigts sont restés dans ma bouche, fades, sans vie, puants la douche de trois jours.
Où avais-tu bien pu les tremper ? Dans les eaux vertes du Léthé ? Ne me fais pas rire, cette eau-là tu l'aurais sucée jusqu'à la dernière goutte. Peut-être les as-tu promenés sur le vagin suintant de l'une de tes congénères, sur le gland luisant de l'un de mes frères, ou dans ton anneau à ordures, le triturant, le fouillant jusqu'à ce que le plaisir bruyant en glisse, tache cette faïence blanche dans laquelle nous nous lavions parmi les mouches, heureux d'arracher nos oreilles à coups de dents. Excorie-moi l'iris, aspire ma prunelle, pose tes dents sur ma pupille !
Flashback.
À trente centimètres de ta main, il y a ce rasoir, nickelé, désigné pour les lignes de la paume de ma main, crois-tu qu'il pourra s'adapter à celle de mon frein ? Noie-moi dans la baignoire, fais-moi ravaler les bulles d'oxygènes qui s'entrechoquent et qui glissent autour de mon larynx, et bois, bois, le bouillon qui sort de mes reins, le sens-tu, le sens-tu couler entre tes seins ? Tâcher de rouge ta peau d'ivoire, te submerger de brun. Le sens-tu t'étouffer enfin ? Non, tu le bois, tu te défonces et t'embourbes dans la rage, tu prends de lentes et profondes gorgées, et ainsi de mon breuvage, tu t'assènes un grand vide, tu grattes les dernières plaques sur mes os, tu les cures, tu les casses sur ton fémur, alors que moi qui ne suis plus que de la peau et des os, je lève deux humérus croisés vers ta face sanctifiée, et de ton visage d'orichalque, me crachant que tu as tout oublié, tu t'enfuis, laissant dans la baignoire de faïence mon corps démembré.


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anonyme

beaucoup de verve dans ce texte rythmé d'une violence qui n'est pas ici q'un artifice recherché