Tom Coraghessan Boyle
La belle affaire
Seuil - Points / 52,25 FF
452 pages
Traduit de l'anglais par Gérard Piloquet

" Un demi-million de dollars...L'affaire était excitante. "C'est moi qui mets les fonds, avait annoncé Vogelsang, et je fournis le terrain. Boyd se pointe là-bas tous les trois ou quatre jours pour surveiller l'opération; toi, tu te charges du travail pratique. On divise par trois."
"Parce que la Marijuana, il allait te la faire pousser en grand, Vogelsang, comme les plants de tabac ni plus ni moins. Il n'allait pas mégoter. Le grand jeu, quoi, le monumental bras d'honneur tiré à la société..."
Avec la même verve picaresque qui faisait déjà merveille dans Water Music, T.C. Boyle tient ici, des semailles à la moisson, la savoureuse et pastorale chronique d'une plantation lucrative qu'un trio d'associés a "scientifiquement" programmée - et, à travers eux, celle d'une génération grande consommatrice de mirages. Car la mirifique récolte ne sera pas seule à partir en fumée...
-Verso du livre-

Liens :

Retrouvez Tom Coraghessan Boyle sur www.tcboyle.com (site de l'auteur)

Retrouvez Budding Prospects sur All about T.C. Boyle (le site "A peu près tout sur T.C. Boyle" et tout le reste à l'avenant).


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Vos critiques

Critique par Jef Tombeur

À la fortune du pot ou La belle affaire...
Par Jef Tombeur

Il était une fois, en Californie, à un quart de lieue du Pacifique, un petit ranch à l'écart, très à l'écart... En fait de ranch, il n'y pousse plus que quelques agrumes. Les "fermiers" sont des Tintinolâtres, apprécient la BD européenne, la bonne vodka, et tirent davantage leurs ressources de l'artisanat que de l'agriculture. Mais parfois, à la veillée, en compagnie d'autres membres du Club des Raconteurs, soit certains vieux potes de l'écrivain Tom Coraghessan Boyle, l'histoire du ranch ressurgit au détour d'une conversation. C'est là que naguère s'envolèrent les espoirs des protagonistes de Budding Prospects (La belle affaire), récit romancé d'une désastreuse – mais hilarante – tentative de faire pousser de la marijuana sur un terrain peu propice. Ah, certes, l'endroit était bien choisi : du rivage, il faut franchir une autre propriété (un élevage), et de la grande route, s'engager dans une suite de raidillons caillouteux au risque de se perdre ou de casser un essieu. Felix, le narrateur, et ses pittoresques compagnons, y séjourneront quelques mois, à se briser l'échine, à suer sous un soleil implacable, à grelotter sous des pluies torrentielles, pour le plus grand profit de l'infâme Vogelsang...
Vogelsang ! Un capitaine d'industrie et un sacré roublard. Et face à lui, Félix, Phil, Aorta, et les autres, ses victimes, ces doux rêveurs qui comptaient échanger le poil qu'ils avaient dans la main pour des paquets d'oseille, ne sont pas de taille. L'aventure tournera au cauchemar, mais Vogelsang aura réussi à décupler ses marrons sans se roussir la paume. Comment ?
Peut-être pas, en réalité, si brillamment que le suggère la fin du livre, aussi insolite que les tribulations des picaresques protagonistes de cette lamentable bouffonnerie. Il est déconseillé d'en prendre connaissance trop à l'écart de lieux d'aisance et d'en entamer la lecture tard dans la soirée : vos sphinctères lâchent plus vite que vos cernes oculaires ne se creusent, sachez-le avant de vous plonger dans ces pages. Embarqué dans cette galère, le lecteur se fera assurément des abdominaux, car si le boquin lui tombe des mains c'est qu'une fois de plus, il est plié de rire.
Ce grand classique de la littérature américaine des années 1970, publié en 1984, fait pourtant l'objet depuis lors d'une glose fort académique. La richesse du style de T.C. Boyle, son remarquable rythme narratif, sont doctement disséqués. Glousser en glosant après s'être retourné la glotte, très peu pour moi : j'arrêterais là. Un mot encore cependant : cette verve se retrouve dans la plupart des autres romans, historiques ou non, de l'auteur (en particulier Water Music, Riven Rock, The Road to Wellville), parus chez Grasset, ainsi que, surtout dans ses recueils de nouvelles (de même chez Grasset). Ses romans plus "sérieux" (World's End ou Au bout du monde, The Tortilla Curtain ou América), lui ont valu un prix Faulkner et un Médécis étranger. Mais sa "pastorale" (Budding Prospects est sous-titré A Pastoral), pour entrer dans l'intimité du Tom C. Boyle de l'époque, c'est vraiment la totale...