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vendredi 11 février 2000, 1h24

L'ancêtre français de Jack Kerouac identifié

BREST (France), 11 fév (AFP) - Jack Kerouac était en vain venu en Bretagne en 1935 pour tenter de retrouver ses origines : trente cinq ans plus tard, l'ancêtre breton de l'écrivain américain est enfin identifié, révèlent les auteurs d'un livre intitulé "Jack Kerouac, Au bout de la route, la Bretagne".

Chassé par un scandale, Urbain-François Le Bihan de Kervoac, fils d'un notaire du Huelgoat, dans le département du Finistère, émigre vers 1725 pour la Nouvelle-France où il se marie en 1732 à Cap-Saint-Ignace. C'est lui qui lègue son nom à l'auteur de "Sur la route".

A l'origine, pour répondre à la demande des quelque 3.000 membres de l'association des Kerouac/Keroack/Kirouac du Canada, Patricia Dagier, généalogiste, a exploré à temps complet pendant trois ans les archives bretonnes, puis du Québec. C'est ainsi qu'elle a fini par remonter avec certitude jusqu'à Urbain-François.

Une traque rendue difficile, explique son co-auteur, le journaliste, Hervé Quéméner, par le fait que le Sieur Le Bihan de Kervoac, tout à son idée d'entamer une nouvelle vie après avoir franchi l'océan, avait pris quelques libertés avec sa véritable identité que les recherches historiques, appuyées par des études graphologiques, ont définitivement permis de rétablir.

"Jack Kerouac, Au bout de la route, la Bretagne" raconte en parallèle la vie d'Urbain-François, d'abord dans la société bretonne du XVIIIè siècle puis dans son nouveau territoire et celle de Jack, pour lequel la quête de l'identité sera une constante de sa courte vie.

Né en 1922 à Lowell (Massachussets), Jack Kerouac - de son vrai nom Jean-Louis Kerouac - était l'enfant d'une famille doublement émigrée: de Bretagne vers le Québec, puis, à la fin du XIXè siècle, du Canada aux Etats-Unis.

A Lowell, rappelle Hervé Quéméner, vivait une forte communauté francophone, employée dans les filatures: "on parlait français à l'école, français à l'église et français chez les Kerouac. Toute sa vie, Jack Kerouac a parlé en français avec sa mère", raconte-t-il.

Pour l'ami d'Allen Ginsberg et de William Burroughs, cette recherche des origines se fera de plus en plus pressante. "Dans la dernière partie de sa vie, il est complètement obnubilé par son identité. Il veut savoir d'où il vient", résume Hervé Quéméner.

L'auteur raconte qu'à cette période, le "père" de la Beat Generation répond aux journalistes qui viennent l'interroger sur sa postérité beatnik et hippie : "parlons plutôt de mes ancêtres bretons".

A son arrivée à Brest en 1965, l'écrivain, qui se présente sous le nom de Jean-Louis Le Bris de Kerouac, se rend, sur les conseils de l'écrivain français Michel Mohrt, chez le libraire-éditeur Pierre Le Bris, avec l'espoir que ce dernier pourra l'aider. Mais les recherches ne donnent rien.

Rentré aux Etats-Unis, Kerouac projette un autre voyage en Bretagne. Mais celui à qui son père disait toujours: "Ti-Jean, n'oublie jamais que tu es Breton", meurt en 1969, sans pouvoir effectuer ce second voyage et lever l'énigme de sa vie.